vendredi 23 novembre 2007

"Sonnet liminaire" de Roger-Arnould Rivière

"Sonnet liminaire":

- Loin de la joie du fruit possible
ce vague à l'âme s'oblitère
évasion du doigt sensible
ou le berceau de ton mystère

O lente foi dans l'invisible
pierres muettes sous la terre
comme le coeur de l'invisible
derrière un sein qui veut se taire

L'ère des êtres se déchire
et le jasmin de l'oeil s'étire
c'est la saison des ellébores

La nuit pressent la fleur qui veille
loin des tentures de merveilles
saisir ce qui n'est pas encore.

Roger-Arnould Rivière

Brèche

Dans l'échancrure thoracique,
Des instants flétris, les nervures
VIBRENT et PERDURENT.
Maraudeur,
Tes singulières COULEURS,
Affiche-les!
Sans logique la stratification
INFINIMENT, LUIT!

Estelle C.

jeudi 22 novembre 2007

Glenn Gould

Franz, Barbara, Brel

Prière d’exorcisme

Prière d’exorcisme
Le chapelet des mots sans archipel
Plongeon
Déflagration aux tympans
Dépravation du langage
Les mots épaves introuvables
Le regard communie, bruissement du vent
Tu trembles, tu te pers, à chercher la trame
Déraison, nervures élimées des oracles
Tu rabâches, tu mâches, tu t’effaces
Dans la bouche des draps qui claquent
Aveuglants, blancs et secs.
Extrait chaque éclat d’obus
Parle, parle
Sans béquille, même à terre, même te traînant sur les coudes
Parle donc !
Parle contre, contre l’engourdissement
Contre le vide, sans chercher à remplir ce vide
Parle pour la résonance
Pour faire naître une corde
J’entends leurs traces, la trace des autres
Et je ne bouge pas, immobile, muette, inerte,
Je ne sais faire un pas.
Au-dedans, au-dedans, l’enchevêtrement pousse
Une ronde, sempiternelle psalmodie, scande
Pourquoi, pourquoi, pourquoi, pourquoi, à l’infini
Je me redresse, le poing sur les lèvres
Raclements de gorge toujours, avertisseurs du danger
À proférer même en silence,
Même en secret, même pour soi-même
Désir de fuite, désir d’affrontement
Les paradoxes entrent en lice
Sans contradiction, pourtant.
Chaque instant, grain, grain de légende
Froisse, froisse-les entre tes doigts
Le minéral en écaille se pose, s’impose
Une langue pioche, tête-bêche avec le silence
Irrespirable suspension, ces arrêts
Le refus d’une question, les refus des questions
Don quichottisme des explications - vain

Estelle C.

mardi 20 novembre 2007

lundi 19 novembre 2007

Écrire par Hervé Piekarski

Écrire

Écrire est difficile.

Écrire n’est pas et ne sera jamais donné à tout le monde. Si écrire était s’exprimer alors écrire serait le fait de tout le monde.

Ecrire n’est pas s’exprimer ; écrire n’est pas non plus le privilège d’une caste d’ayants droit, légitimes, souvent auto-proclamés. Eux savent ce que l’écriture est. Nous ne le savons pas. Eux savent, comprennent quelque chose au monde.

Nous sommes ignorants.

Un réseau s’est constitué autour de la nécessité de travailler au plus près de cette ignorance, là est le travail de l’œuvre.

L’écrivain est peut-être celui qui ne sait pas se servir des mots.

Ce non-savoir n’est pas une errance lorsqu’il devient écriture il devient expérimentation.

Expérimenter la langue non comme savoir mais comme ignorance interrogatrice est l’objet des ateliers d’écriture, pivots des sites constituant le réseau.

Nous ne savons pas ce que la langue peut.

Nous savons que l’écriture fait de nous une question.

L’espace de l’écriture doit devenir ce qu’il n’a jamais été, un espace public. La question de l’existence humaine comme espace public est la question sociale, politique et artistique qui fonde le réseau Boutik & Co. Il relève de sa vocation de pouvoir à quelque moment que ce soit se tourner vers tous les arts disponibles, vers tous les questionnements praticables et impraticables. A l’origine de ce réseau étaient des rencontres entre gens qui ne se satisfont pas de la légitimation du clivage entre classes possédant un savoir de la langue et classes privées de la parole.

Le problème n’est pas de rendre la parole à qui que ce soit. La parole ne manque pas.

La langue manque. La langue n’est pas une institution, n’est pas une autorité.

La langue est ce qui apparaît parfois dans la déchirure que produisent certains écrits. Il ne rentre pas dans la vocation du réseau Boutik & Co d’exercer un contrôle sur la provenance de ces écrits. Nous ne savons pas d’où, de qui l’écriture peut venir.

Toujours est-il que depuis l’aube des temps l’écriture vient, le son vient, l’image vient, le corps vient, le sens vient. Le sens n’est pas l’objet d’un savoir. Le sens est une création.

Nous n’entendons pas vivre sous le régime du sens légitime, nous entendons ouvrir par le réseau Boutik & Co. un espace de création d’un sens qui ne doive plus rien aux certitudes de nos idéologies.

Créer ce qui demain nous fera tenir debout est notre utopie.

Hervé Piekarski

Ecrivain, poète et animateur d’ateliers d’écriture

source : La boutique d’écriture

Toccata & Fugue J-S Bach

Kanfr

mercredi 14 novembre 2007

Traces

Du sillon au firmament éclot la source
tarie
geyser invertébré pétale de lumière
rarement
espéré en creux la traîne pailletée
miroite
dans une pluie mortifère sous les
paupières
le cobalt d’une résurrection accablée
se noie
dans la boue agile inconséquence d’une
parure
perdue comme les mots sous la terreur
antique
un clocher thoracique panique devant la
brèche
géographe sans méridien à poursuivre
ineffablement
persistante prière cette braise murmurée
souffle
sur tes antennes le diadème dépecé d’une
morsure
incontournée sur l’autre visage la page
intraduisible
opiniâtreté avalanche de comètes muettes
incandescence
du sillage fourmillement étourdi une musique
sans clé
ni cadenas où s’annule toute emprise.

Estelle C.