mardi 30 septembre 2008

Agir, je viens - Henri Michaux


Angelina Sierra
Agir, je viens

Poussant la porte en toi, je suis entré
Agir, je viens
Je suis là
Je te soutiens
Tu n'es plus à l'abandon
Tu n'es plus en difficulté
Ficelles déliées, tes difficultés tombent
Le cauchemar d'où tu revins hagarde n'est plus
Je t'épaule
Tu poses avec moi
Le pied sur le premier degré de l'escalier sans fin
Qui te porte
Qui te monte
Qui t'accomplit

Je t'apaise
Je fais des nappes de paix en toi
Je fais du bien à l'enfant de ton rêve
Afflux
Afflux en palmes sur le cercle des images de l'apeurée
Afflux sur les neiges de sa pâleur
Afflux sur son âtre.... et le feu s'y ranime

AGIR, JE VIENS
Tes pensées d'élan sont soutenues
Tes pensées d'échec sont affaiblies
J'ai ma force dans ton corps, insinuée
...et ton visage, perdant ses rides, est rafraîchi
La maladie ne trouve plus son trajet en toi
La fièvre t'abandonne

La paix des voûtes
La paix des prairies refleurissantes
La paix rentre en toi

Au nom du nombre le plus élevé, je t'aide
Comme une fumerolle
S'envole tout le pesant de dessus tes épaules accablées
Les têtes méchantes d'autour de toi
Observatrices vipérines des misères des faibles
Ne te voient plus
Ne sont plus

Equipage de renfort
En mystère et en ligne profonde
Comme un sillage sous-marin
Comme un chant grave
Je viens
Ce chant te prend
Ce chant te soulève
Ce chant est animé de beaucoup de ruisseaux
Ce chant est nourri par un Niagara calmé
Ce chant est tout entier pour toi

Plus de tenailles
Plus d'ombres noires
Plus de craintes
Il n'y en a plus trace
Il n'y a plus à en avoir
Où était peine, est ouate
Où était éparpillement, est soudure
Où était infection, est sang nouveau
Où étaient les verrous est l'océan ouvert
L'océan porteur et la plénitude de toi
Intacte, comme un œuf d'ivoire.

J'ai lavé le visage de ton avenir.

Henri Michaux

1 commentaire:

Sylvaine Vaucher a dit…

Du même Michaux : Extrait de "Saisir" avec illustrations de sa divine et folle main :
1979 l'entier, dédié à Micheline Phan Kim Chi
"...Au désir passager d'"assimiler", aux forces pour le maintien de la forme s'oppose immanquablement en moi l'instinct opposé lequel ne peut disparaître.
Echapper, échapper à la similitude, échapper à la parente, échapper à ses "semblables".
Désobéir à la forme
Comme si, enfant, je me l'étais juré.
Une ressemblance interne, ce serait plus excitant à attraper, non par ruse, mais à bras le corps si je puis dire; ce serait aussi plus redoutable.
Qu'est-ce qu'une ressemblance sans dissemblance ?
Un dessin sans combat ennuie.
Il est incomplet. Qui ne le sent ?"