samedi 8 novembre 2008

"Tavalod è-digar"— Autre naissance,Foroukh Farrokhzâd

Forough Farrokhzad est née à Téhéran en 1935 et morte accidentellement en 1967, À 27 ans (1962), elle réalise un film intitulé "Khane siah ast" (La maison est noire) dans la léproserie de Baba Baghi, près de Tabriz, et adopte le fils d'un couple de lépreux.

Forough Farrokhzad est une des plus belles voix de la poésie iranienne. Sa vie même, - autant que son oeuvre -, l'a rendue célèbre. C'est la première poétesse iranienne contemporaine à s'exprimer en tant que femme avec le courage que cela implique. Son oeuvre la plus importante a pour titre Une autre naissance.

Biographie lu sur pierdelune : http://www.pierdelune.com/farrok.htm

"Tavalod è-digar" — Autre naissance

Tout mon être est un verset de l'obscurité

Qui en soi-même te répète

Et te mènera à l'aube des éclosions et des croissances éternelles

Je t'ai soupiré et soupiré

Dans ce verset je t'ai, à l'arbre, à l'eau et au feu, greffé.

La vie peut-être

Est une longue rue que chaque jour traverse une femme avec un panier

La vie peut-être

Est une corde avec laquelle un homme d'une branche se pend

La vie peut-être est un enfant qui revient de l'école

La vie peut-être c'est allumer une cigarette

dans la torpeur entre deux étreintes

Ou le regard distrait d'un passant

Qui soulève son chapeau

Et à un autre passant, avec un sourire inexpressif, dit : "Bonjour."

La vie peut-être est cet instant sans issue

Où mon regard dans la prunelle de tes yeux se ruine

Et il y a là une sensation

Qu'à ma compréhension de la lune et ma perception des ténèbres je mêlerai.

Dans une chambre à la mesure d'une solitude

Mon coeur

A la mesure d'un amour

Regarde

Les prétextes de son bonheur

Le beau déclin des fleurs dans le vase

La pousse que dans le jardin tu as plantée

Et le chant des canaris

Qui chantent à la mesure d'une fenêtre.

Ah...

C'est mon lot

C'est mon lot

Mon lot

C'est un ciel qu'un rideau me reprend

Mon lot c'est de descendre un escalier abandonné

Et de rejoindre une chose dans la pourriture et la mélancolie

Mon lot c'est une promenade nostalgique dans le jardin des souvenirs

Et de rendre l'âme dans la tristesse d'une voix qui me dit :

"Tes mains

Je les aime".

Mes mains je les planterai dans le jardin

Je reverdirai, je le sais, je le sais, je le sais

Et les hirondelles dans le creux de mes doigts couleur d'encre

Pondront.

A mes oreilles en guise de boucles

Je pendrai deux cerises pourpres et jumelles

Et à mes ongles je collerai des pétales de dahlia.

Il est une rue là-bas

Où des garçons qui étaient de moi amoureux, encore

Avec les mêmes cheveux en bataille, leurs cous graciles

et leurs jambes grêles,

Pensent aux sourires innocents d'une fillette qu'une nuit

le vent a emportée avec lui.

Il est une ruelle

Que mon coeur a volée aux quartiers de mon enfance.

Volume en voyage

Sur la ligne du temps

Volume qui engrosse la sèche ligne du temps

Volume d'une image vigile

Qui revient du festin d'un miroir

Et c'est ainsi

Que l'un meurt

Et que l'autre reste.

Au pauvre ruisseau qui coule dans un fossé

Nul pêcheur ne pêchera de perles.

Moi

Je connais une petite fée triste

Qui demeure dans un océan

Et joue son coeur dans un pipeau de bois

Doucement doucement

Une petite fée triste

Qui la nuit venue d'un baiser meurt

Et à l'aube d'un baiser renaît.

Foroukh Farrokhzâd (1935-1967)

poème traduit par: Mohammad Torabi et Yves Ros

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Un auteur que je ne connaissais pas..."Où mon regard dans la prunelle de tes yeux se ruine"